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Source : Grimoard - Lettres et mémoires choisi parmi les papiers originaux du Maréchal de Saxe - T.2 p.174

Le Maréchal DE SAXE au Comte D'ARGENSON

A Bruxelles, Le 1er. mai 1746.

Rien ne peut être plus flatteur pour moi, Monsieur , que les termes obligeans avec lesquels vous voulez bien me faire part de la satisfaction que le Roi a eue de ma conduite,de l'approbation qu'il y donne, et celle que vous m'accordez vous-même, Monsieur : c'est l'unique récompense que j'aie eu pour point de vue, et vous avez satisfait mes désirs de la façon du monde la plus obligeante.

J'ai reçu hier la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire le 24, je n'ai ac­cordé de passe-ports qu'à deux ou trois Capitaines ou Lieutenans Hollandais que M. van der Duyn m'a demandé, pour envoyer l'un en Hollande, l'autre à Maestricht, et l'autre à Breda ; et c'est vraisemblablement, l'un pour rendre compte à ses maîtres, et les deux autres pour porter des ordres à partie de leurs équipages qui sont restés à Breda et Maestricht ; j'en ai accordé deux aussi aux ôtages qui ont été chez moi pen­dant plusieurs jours, et je n'ai pu les refu­ser à leur priere ; j'en ai accordé quatre à des Officiers blessés qui sont restés ici ; mais comme le terme de ces passe-ports est limité pour un mois , ils ne pourront vraisembla­blement pas en faire usage, et il m'a paru trop dur de les refuser à des gens de cet état : j'en ai donné six à des Officiers qui restent avec les soldats blessés ici, mais ils ne sont que pour rejoindre leur troupe où elle se trouvera en France ; j'en ai accordé un à M. van der Duyn, Général-Commandant les Hollandais, et un à M. Rumpf, Général-Major, et c'est une faute qui peut m'être imputée, mais c'étoit avec eux que je traitois.

Quant aux Autrichiens, j'ai prevenu vo­tre intention, Monsieur, et quant à faire sentir aux Hollandais le mécontentement que le Roi avoit de leur conduite, je n'y étois point autorisé, et j'ai cru qu'il convenoit mieux de différer les marques du res­sentiment de S. M. jusqu'au temps qu'ils seroient rendus au lieu de leur destination, parce que la conduite de cette quantité de prisonniers en seroit plus aisée ; enfin, je vous ai marqué , Monsieur , dans une de mes précédentes, ce que je pensois de la manière de les garder, et je ne change pas d'o­pinion à cet égard, à moins que vous ne vouliez, par un traitement rigoureux, faire sentir à ces prisonniers mêmes le méconten­tement que le Roi a d'eux, qui, à ce qui me semble, ne devroit tomber que sur leurs maîtres.

J'ai pris sur moi de faire ici un échange d'un Capitaine du régiment du Roi , qui a été pris par les Hollandais pendant le siège, contre un Capitaine Hollandais.

Si j'avois su que M. de Sade étoit encore prisonnier d'Etat de la Reine d'Hongrie , je n'aurois point permis à M. de Kaunitz de s'en aller mais j'ai cru qu'un Ministre de cet ordre-là ne feroit que nous embarrasser.

Voilà tout ce que j'ai à vous alléguer, Monsieur, pour la justification de ma conduite ; je n'ai d'ailleurs pas manqué de faire valoir à MM. les Autrichiens le peu de retard que j'opposois au renvoi de leurs prisonniers, et j'ai permis aux Feld-Maréchaux Généraux, et autres Officiers, de rester àBr uxelles, ou d'aller dans tel autre lieu qu'il qu'il leur plairoit, jusqu'à leur échange et j'ai fait remettre les passe-ports au Commissaire Seigneur pour les leur remettre.

Je n'ai pu vous envoyer que le 24, Monsieur, le tableau de la marche de ces pri­sonniers, parce que nous étions deux à faire cet arrangement, le Général Van-der-Duyn et moi ; elle porte sur Arras en trois divisions, escortées chacunes par un régiment de cava­lerie, et où trois régimens de ceux destinés pour l'Angleterre, doivent les relever pour conduire la première division à Amiens, la seconde à ….. et la troisième à ….. où elles recevront vos ordres.

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