CHAPITRE X
MAISON
DU ROI
COMPAGNIES A CHEVAL ET A PIED DE LA GARDE ORDINAIRE DU ROI
De tout temps les rois ont entretenu pour leur garde personnelle, des corps de troupes qui campaient ou logeaient au château et à la tête desquels ils combattaient à la guerre. Par l’ordonnance de 1671, qui organisa ce qu’on appelait la maison du roi, Louis XIV ne fit que régler le rang de préséance de corps qui existaient depuis plus de cent ans.
La maison du roi fournissait à deux services distincts.
La garde du dedans du Louvre, composée de
Ces deux dernières compagnies n’étant point destinées à la guerre, nous n’en dirons rien ici.
L’autre troupe, appelée garde du dehors du Louvre, uniquement militaire, comptait 5 escadrons et 10 bataillons, savoir :
A l’armée, 2 bataillons des gardes françaises et 2 des gardes suisses formaient ce qu’on appelait la brigade des gardes.
Les compagnies à cheval, réunies à la gendarmerie de France, formaient ce qu’on appelait la maison du roi. La première division comprenait les grenadiers à cheval et les 8 escadrons des gardes du corps. La deuxième division qu’on appelait maison rouge, à cause de la couleur des habits, comprenait les 2 escadrons des gendarmes et chevau-légers de la garde, les 2 escadrons des mousquetaires et les 8 escadrons de la gendarmerie de France. Les grenadiers à cheval étaient censés remplir l’office de pionniers ou dragons pour la maison du roi et marchaient en tête des gardes du corps.
GARDES DU CORPS DU ROI
Les gardes du corps, selon l’ordonnance de 1671 confirmée par celle de janvier 1737, formaient 4 compagnies de 330 gardes chacune, qui, entre elles, prenaient rang suivant l’antiquité de leur création pour la première, et pour les trois autres appelées compagnies françaises suivant l’ancienneté de leur capitaine.
La première, dite compagnie écossaise, fut formée en 1440, par Charles VII, avec les archers écossais, tirés de la compagnie d’ordonnance des gendarmes écossais du roi, de 100 lances fournies, compagnie qui existait encore à la tête de la gendarmerie de France, en 1740.
Depuis 1560, après la disgrâce de Jacques de Montgommery et le départ de Marie Stuart, la compagnie écossaise se recruta de gentilshommes français, mais cependant elle conservait toujours son ancien mot du guet : amir (I am here). Le capitaine par sa charge avait le commandement supérieur de toutes les troupes de la maison du roi.
Le major et deux aides-majors pour les quatre compagnies comptaient à cette compagnie.
Les 2 compagnies suivantes furent formées, par Louis XI, d’archers tirés de 2 compagnies d’ordonnance en 1471 et 1479. La quatrième, formée par François 1er, prit rang en 1545.
L’antiquité
de leur création donnait aux capitaines des gardes des prérogatives
de préséance et d’autorité sur tous les chefs de corps
de l’armée.
Louis XIV abolit la vénalité des charges d’officiers et se réserva
le droit de nomination aux places. Cependant le capitaine agréait encore
les services des gardes et nommait les officiers subalternes jusqu’à
l’exempt. (On appelait ainsi le bas officier qui dans son service au palais
était exempté de porter la cuirasse, le hocqueton ou l’arquebuse).
Pour être admis aux gardes du corps, il fallait être catholique, né sujet du roi, avoir 5 pieds 5 pouces de hauteur, être vigoureusement constitué, bien visé, et gentilhomme, c’est-à-dire de famille vivant de son revenu ou tout au moins hors du commun (sic). De tout temps, les officiers appartenaient à la grande noblesse ; mais ce n’est qu’en 1775, c’est-à-dire sous Louis XVI, qu’une ordonnance déclara que dorénavant il faudrait prouver 200 ans de noblesse pour obtenir la charge d’officier, et justifier quatre quartiers pour être agréé simple garde, distinction injurieuse qui privait le roi des services d’une classe de sujets respectables, qui avaient servi ses ancêtres avec honneur, courage et loyauté. Les capitaines des gardes du corps étaient des lieutenants généraux ou des maréchaux de France. Tous les autres officiers nommés par le roi avaient rang de mestre de camp et pouvaient devenir brigadier, maréchal de camp, lieutenant général, sans quitter leur fonction. Les lieutenants étaient nommés parmi les enseignes ; mais ceux-ci étaient choisis alternativement parmi les mestres de camp de la cavalerie et les exempts de la compagnie. Les 12 exempts qui, presque tous, avaient rang de mestre de camp, étaient de même choisis alternativement parmi les lieutenants-colonels de cavalerie et les brigadiers de la compagnie. Les brigadiers et autres gradés étaient toujours nommés parmi les gardes.
Ceux-ci avaient rang de lieutenant, et ceux qui comptaient 15 ans de service reçurent, après 1750, commission et retraite de capitaine ; (les années de service aux gardes du corps comptaient pour acquérir la noblesse personnelle (décembre 1758).
La solde était variable selon le service. A la cornette, elle était ainsi réglée :
L’aumônier recevait 40 sols, le chirurgien 20 sols.
Les gardes du corps recevaient du roi, tous les deux ans, un grand habit d’uniforme ; mais le reste de l’équipement était payé par eux. Ils devaient posséder 2 chevaux et entretenir un valet. En service auprès du roi, les gardes recevaient en outre la nourriture à la cour en argent ou en nature, les places de fourrage supplémentaires, les émoluments et les récompenses. A Versailles, ils étaient logés par le roi dans un hôtel spécial. Leurs quartiers ordinaires étaient situés dans 16 petites villes de l’Ile-de-France, savoir : 1re compagnie écossaise, Beauvais, Gisors, Montdidier, Les Andelys ; 2e compagnie, 1re française, Coulommiers, Provins, Senlis, Pont-Sainte-Maxence ; 2e compagnie française, Soissons, Roye, Noyon, Verneuil ; 3e compagnie française, Poissy, Vernon, Mantes, Pontoise. Les gardes y étaient logés chez l’habitant, qui recevait une indemnité de la paroisse. On devait fournir à chaque garde quel que fût son grade : une chambre à feu convenable, un lit garni de 2 matelas, un mobilier décent, 7 chandelles par semaine, le feu, 8 serviettes, 2 nappes, 1 marmite, la vaisselle et les ustensiles de cuisine. Dans la maison, le propriétaire ayant désigné sa chambre, le garde avait le droit de choisir celle qui lui agréait le mieux. L’aide-major et un échevin devaient faire le logement, qui était changé tous les ans. La plus exacte discipline devait être observée sous peine de renvoi immédiat du corps. Les gardes prenaient pension chez leur hôte et payaient la dépense. Pour que celle-ci fût moins forte, ils étaient réunis par quatre, et, chaque semaine, la table était mise au domicile de l’un d’eux ; en sorte que l’hôte n’avait à veiller à la table de ses pensionnaires qu’une semaine sur quatre.
La garde auprès du roi s’appelait le guet.
Chaque brigade (il y en avait 6 par compagnie) fournissait 8 gardes, 1 brigadier, 1 exempt, au total 60 gardes par compagnie. Chaque compagnie fournissait autant ; la compagnie écossaise 2 gardes de la manche en plus. Le guet ainsi formé de 240 gardes restait 3 mois consécutifs au château. Les 4 capitaines prenaient alternativement le service pour 3 mois aussi et amenaient le timbalier de leur compagnie. Les quatre compagnies fournissaient chacune 1 lieutenant, 1 enseigne, 1 étendard et 1 trompette. Le reste de la compagnie s’exerçait aux manœuvres militaires dans ses quartiers. Pour être admis au guet, il fallait avoir un an de service au corps. Les gardes comme officiers jouissaient du semestre un hiver sur trois.
La 1re compagnie écossaise comptait, en outre des 330 gardes qui la composaient, 24 gentilshommes qu’on appelait les gardes de la manche, parce que, dans toutes les circonstances où le roi paraissait en public, ils marchaient à sa droite et à sa gauche. Leur service ne durait qu’un mois. Ils se rendaient directement de chez eux à la cour. A la messe, à l’audience, ils se tenaient debout, la pertuisane dorée à la main. Dans les grandes cérémonies, sacre, mariage, lit de justice, etc., six étaient de service. Lors des funérailles, tous étaient convoqués ; alors ils devaient entourer le lit royal. Eux seuls devaient déposer le corps au cercueil, et le cercueil au tombeau. Un autre officier, qu’on appelait le premier homme d’armes de France, figurait aussi dans le cortège royal. Les gardes de la manche portaient l’habit des gardes du corps. Par-dessus, ils endossaient un riche corselet, appelé hocqueton ou cotte d’armes, à fond blanc de soie surbrodé de fleurs de lys et d’ornements d’or. (Voir la figure en tête du volume.)
L’équipement, l’armement, le harnachement des gardes du corps était celui de la gendarmerie de France.
L’habillement des quatre compagnies était semblable il consistait en un habit bleu turquin, parement, doublure et veste rouges ; manches en bottes, poches en pattes, agréments, boutons, et bordé d’argent en plein sur le tout. Culottes et bas rouges, souliers à boucles, ceinturon de peau blanche galonné d’argent, chapeau bordé d’argent, cocarde noire.
Équipage du cheval en drap bordé d’argent pour les gardes, en velours bordé et frangé d’argent pour les officiers.
La compagnie écossaise avait les 6 étendards de soie blanche brodés d’or et d’argent, la bandoulière à carreaux de soie blanche à galons d’argent, les housses de drap rouge.
La 1re compagnie française, 6 étendards de soie bleue, la bandoulière à carreaux de soie bleue et argent, équipages bleus.
La 2e compagnie française, 6 étendards de soie verte, bandoulière à carreaux verte et argent, équipages de drap vert.
La 3e compagnie française, 6 étendards de soie jaune, bandoulière à carreaux de soie jaune, équipages jaunes.
Ces trois compagnies roulaient entre elles suivant l’ancienneté de leur capitaine.
La solde relatée plus haut fut modifiée le 28 décembre 1758, et portée à 2 livres 12 sols au simple garde, et pour les autres augmentée proportionnellement au grade, au moyen de quoi les suppléments, gratifications, nourriture à la cour, furent supprimés. Le service devint peu à peu honorifique vers les dernières années du règne ; jusqu’alors eux seuls avaient eu la police et le service d’ordre dans le château, auprès du roi en toutes circonstances, en campagne, en voyage ou à la chasse. En 1772, cette partie du service fut probablement jugée trop pénible, car on créa une compagnie de la maréchaussée spéciale pour le service des voyages et chasses de Sa Majesté, et les gardes du corps ne réclamèrent point.
COMPAGNIE DES CENT GARDES SUISSES ORDINAIRES DU CORPS DU ROI
Cette compagnie partageait avec les gardes du corps le service de police dans l’intérieur des salles du château royal. Elle était composée de soldats tirés pour la plupart du régiment des gardes suisses et choisis avec grand soin. Vers la fin de la monarchie, cette compagnie ne comptait que des géants dont le plus petit avait six pieds et un pouce. Autrefois la grande taille n’était qu’une condition accessoire. Lorsque le régiment des gardes suisses était à l’armée et le roi en guerre, cette compagnie tenait la droite du régiment, servait de compagnie de grenadiers, et montait la garde à la tente du roi.
A la cour, il y avait journellement 2 escouades de 16 gardes chacune, relevées toutes les 24 heures. Leur service consistait à empêcher d’entrer dans certains appartements. Les jours de réception et d’audience solennelles, ils se tenaient, la hallebarde à la main, dans le grand escalier. Ils formaient la haie dans la chapelle, depuis le chœur jusqu’au dehors.
Lorsque le roi, en cérémonie, se rendait quelque part en carrosse, ils entouraient la voiture royale.
Dans toutes les occasions, le capitaine des gardes suisses précédait le roi. Vêtus du grand habit à la Française, tout rouge, galonné d’or, les officiers, comme insigne de leur autorité, portaient à la main un bâton d’ébène à bout d’ivoire.
Par privilège spécial, le jour où le roi créait des chevaliers du Saint-Esprit, les cent suisses servaient les viandes à la table du roi.
La compagnie se composait de 1 capitaine colonel, français, qui seul avait autorité pour admettre les soldats ; 2 lieutenants, un français et 1 suisse, celui-ci juge au civil et criminel pour les soldats du corps ; 2 enseignes, 1 français et 1 suisse, servant par semestre ; 8 exempts, dont 4 français et 4 suisses, servant 2 par quartiers : 1 exempt français faisait fonction de major ; 4 fourriers maréchaux des logis français et suisses ; 1 porte-drapeau suisse ; 1 clerc du guet (domestique pour nettoyer la salle des gardes) ; 6 caporaux ; 90 gardes ; 4 tambours ; 1 fifre ; 18 vétérans dispensés du service ; 1 aumônier ; 1 chirurgien ; 1 apothicaire. La solde était de 15 sols par jour au simple garde, 35 sols pour l’exempt, 5 livres pour l’enseigne. Le capitaine colonel chargé de l’entretien du corps recevait 20,000 livres par an.
Les cent suisses
portaient trois sortes d’habits : en guerre, un semblable à celui
des sergents du régiment des gardes suisses : habit de drap bleu,
parements et doublure de drap rouge bordé d’or ; veste, culotte,
bas bleus; chapeau bordé d’or. Armement : fusil, baïonnette,
sabre. Au château, ils portaient l’habit de livrée de drap bleu,
doublure rouge, parements de velours cramoisi, garni en plein et sur les coutures
le galon de la grande livrée du roi ; un baudrier de buffle blanc
couvert de la livrée du roi, frangé de soie rouge, bleue et
blanche ; un nœud de rubans cramoisis sur l’épaule droite ;
veste bleue bordée d’or, boutons dorés ; culotte et bas
bleus ; chapeau bordé d’or, avec plumet bleu, blanc et rouge ;
une épée au baudrier, la hallebarde à la main.
Pour les jours de grande cérémonie, ils reprenaient leur antique
costume : un pourpoint à la livrée du roi, entaillé
de taffetas rouge et bleu par opposition ; culotte rouge galonnée
à la livrée du roi ; bas blancs ; ceinturon galonné
d’or et de livrée ; fraise blanche autour du cou. Sur la tête,
une toque rouge à plumes blanches. Pour armes, l’épée,
la hallebarde. Les officiers portaient en tout temps l’habit rouge galonné
d’or à la Bourgogne ; chapeau bordé d’or avec
plumet blanc.
Cette compagnie fut maintenue jusqu’à la chute de la monarchie et dissoute le 12 août 1792.
GARDE DU DEHORS DU LOUVRE
COMPAGNIE DES GENDARMES DE LA GARDE ORDINAIRE DU ROI
Cette compagnie d’ordonnance fut créée par Henri IV pour la garde personnelle du dauphin en 1602. Le roi y plaça de nombreux et fidèles gentilshommes vieillis à son service. Louis XIII à son avènement la conserva pour sa garde particulière. Elle marchait la première de la maison rouge. Le roi en était le capitaine, et son capitaine-lieutenant servait toute l’année à la cour. Celui-ci ne rendait compte qu’au roi seul et avait toujours accès dans sa chambre, où les étendards étaient déposés. Cette charge resta dans la famille de Rohan depuis 1673 jusqu’à la réforme de cette compagnie. Tous les officiers avaient rang de colonel, ainsi que les quatre premiers maréchaux des logis. Les brigadiers et sous-brigadiers avaient rang de lieutenant-colonel ; les gendarmes, rang de lieutenant, de capitaine après quinze ans de service. Pour être admis il fallait avoir servi comme officier dans un corps de cavalerie, et être agréé par le capitaine-lieutenant. Les lettres de convocation pour l’assemblée, portaient en tête : « Monsieur mon compagnon », le capitaine-lieutenant y signait : « Votre très affectionné serviteur ». Après vingt ans de service dans ce corps, une déclaration de Louis XIV conférait la noblesse personnelle. Les officiers de cette compagnie à cheval prêtaient serment de fidélité devant un maréchal de France, aussi à cheval. Ils ne pouvaient posséder ni compagnie ni régiment.
Les charges comme celles de la gendarmerie de France étaient vénales et tarifée :
200,000
livres pour le capitaine lieutenant.
120,000
livres pour les 2 capitaines sous-lieutenants.
100,000
livres pour chacun des 3 enseignes.
80,000
livres pour chacun des 3 guidons.
La solde journalière était tarifée ainsi :
Au moyen de cette solde les gendarmes entretenaient deux chevaux de selle et un de bât, un valet, etc. Ils se cotisaient pour payer l’aumônier, le chirurgien, l’apothicaire, un sellier, un maréchal ferrant et leurs aides.
Cette compagnie servit sans solde pendant toute la minorité de Louis XIV.
Le roi faisait cadeau des armes à feu, et avait offert aux gendarmes un hôtel à Versailles. Chaque brigade restait pendant un trimestre de service pour le guet auprès du roi.
L’équipement de cette troupe était luxueux. La cuirasse en plastron était de fer bruni niellé d’or. L’habit en campagne était en drap rouge orné de revers, de parements de velours noir et le manteau rouge, parementé de velours noir. Cet habillement fut modifié en 1770 et surchargé d’ornements d’or et de velours.
Cette compagnie, réduite à 50 hommes et 10 officiers par le comte de Saint-Germain, fut définitivement supprimée en 1787, en même temps que la gendarmerie de France, par raison d’économie.
CHEVAL-LÉGERS DE LA GARDE ORDINAIRE DU ROI
Cette compagnie était plus ancienne que celle des gendarmes. Les registres remontent à 1588 et c’est Filhet, seigneur de la Curée, qui la commandait dans l’armée du roi de Navarre.
Lorsque Henri devenu roi de France créa la compagnie des gendarmes de la garde, il proposa à ses chevau-légers navarrais de les appeler gendarmes ; ils préférèrent garder un nom qu’ils avaient illustré par leur intrépidité. Les privilèges, charges, emplois, grades, etc., étaient équivalents à ceux des gendarmes. Ils passaient les seconds, mais le recrutement, les faveurs, le traitement étaient semblables pour les deux compagnies. Dans ce corps il y avait 72 pensionnaires appelés aussi capitaines appointés. C’était les 72 plus anciens chevau-légers qui recevaient du roi une pension de 300 livres. Le capitaine-lieutenant admettait seul les postulants qui tous étaient des officiers ayant déjà servi. Dans les bâtiments que le roi leur avait offerts à Versailles, on avait installé une académie où de nombreux officiers d’infanterie et de cavalerie venaient, pendant un an, se perfectionner dans les arts de l’escrime, l’équitation, les connaissances militaires, théoriques et pratiques. Ces officiers endossaient alors l’uniforme de la compagnie et comptaient comme surnuméraires, sans autre solde que celle de leur grade.
Le roi, comme capitaine, gardait toujours dans sa chambre les étendards de la compagnie, et, chaque jour, un chevau-léger venait prendre le mot d’ordre de sa bouche.
C’est aussi comme capitaine qu’il équipait, habillait et montait le timbalier et les 4 trompettes. Le grand écuyer devait en conséquence veiller à leur entretien et leur fournir tous les deux ans, un habit complet à la livrée.
Le costume des chevau-légers était le même que celui des gendarmes, sauf que les boutons étaient argentés et que les boutonnières étaient bordées d’argent.
Les rois Louis XIV et Louis XV portaient habituellement, à la guerre, le costume de capitaine des chevau-légers.
L’armement était le même que pour la gendarmerie de France, la carabine rayée à balle forcée, 2 pistolets, un sabre et une cuirasse noircie niellée d’argent et d’or. Les officiers étaient montés sur des chevaux gris.
Cette compagnie, réduite à 50 hommes en 1776, fut supprimée en 1787.
MOUSQUETAIRES DE LA GARDE ORDINAIRE DU ROI (2 compagnies)
La compagnie des chevau-légers navarrais dont nous venons de parler comptait dans ses rangs, en 1620, sous le nom de carabins, mousquetaires, des soldats de fortune chargés du rôle d’éclaireurs.
Ces hommes furent réunis en 1622 en une compagnie qui prit le nom de grands mousquetaires du roi. Le capitaine de cette nouvelle troupe resta longtemps le subordonné du capitaine-lieutenant des chevau-légers. Dans ce corps on admettait indistinctement des gentilshommes ou des soldats éprouvés.
La mode s’établit bientôt de servir aux mousquetaires, et depuis Louis XIV c’est là que venaient s’enrôler les jeunes gens qui se destinaient à la carrière militaire, véritable école pratique pour tous ceux qui, plus tard, voulaient obtenir la permission d’acheter ou de lever une compagnie. C’est là aussi que Louis XIV fit servir son petit-fils le duc de Bourgogne, alors âgé de sept ans. Les mousquetaires s’engageaient vers l’âge de 16 ou 17 ans, restaient trois ans à la compagnie, puis obtenaient une commission de capitaine. Ceux qui restaient parvenaient, à l’ancienneté, aux grades et pensions que le roi avait créés pour les 52 plus anciens (250 livres annuelles).
Les mousquetaires payaient tout leur équipage de leurs deniers. Ils ne recevaient même pas le fusil. Cependant la subreveste, sorte de justaucorps sans manche dont ils devaient se revêtir dans le service, appartenait au roi. Son usage date de 1685 seulement.
Les mousquetaires, comme les dragons, faisaient alors un service d’infanterie. Ils avaient en ce cas un drapeau pour enseigne. Si les régiments des gardes à pied françaises ou suisses ne pouvaient fournir, les mousquetaires prenaient la garde et veillaient aux abords de la résidence royale.
Les exercices militaires, la manière de combattre étaient ceux des dragons ; c’est pour cela que nous les voyons aux tranchées devant Valenciennes en 1677. Vers la fin du règne de Louis XIV, ils servirent davantage comme troupes à cheval. Enfin, sous Louis XV, ils étaient devenus habituellement troupe de cavalerie.
La finance des compagnies était la même qu’aux gendarmes et chevau-légers ; la solde des officiers était la même.
Pour la troupe :
Ces gentilshommes, comme toute la gendarmerie, devaient sur leur solde entretenir un valet et une bête de somme pour leur service.
Une seconde compagnie fut formée par le cardinal de Mazarin en 1651 pour sa sûreté personnelle et fut léguée au roi qui la mit dans sa garde en 1661. Ces deux compagnies furent réorganisés en 1665.
Elles logeaient à Paris dans leur hôtel particulier : la 1re compagnie, rue du Bac, la 2e, rue de Charenton.
Le drapeau et les 4 étendards de chaque compagnie étaient déposés chez le roi, et 12 mousquetaires venaient au château tous les cinq jours pour leur garde.
La première compagnie était tout entière montée sur des chevaux gris, la seconde sur des chevaux noirs. De là les appellations de mousquetaires gris et noirs.
Leur habit entièrement rouge était bordé de fil d’or, boutons dorés, ainsi que les boutonnières, équipage du cheval en drap rouge galonné d’or, pour la première compagnie. Boutons, boutonnières, galons d’argent pour la seconde. Chapeau de feutre noir bordé d’or ou d’argent à plumet blanc.
Le vêtement caractéristique des mousquetaires, la subreveste, était un surtout sans manche qui s’agrafait sous le bras, en drap bleu doublé de rouge, galonné d’argent suivant le grade et orné sur la poitrine et le dos d’une croix de velours blanc, fleur de lis d’argent aux branches, à flammes rouge et argent pour la première compagnie, jaune et argent pour la deuxième.
Les officiers ne portaient jamais cette subreveste ; mais en guerre, la cuirasse double.
Les mousquetaires ne portaient point la cuirasse.
L’armement consistait en un sabre de 33 pouces de lame, 2 pistolets, un fusil à baïonnette, qu’ils portaient attaché à la selle, comme les dragons, la crosse en bas.
Les tambours portaient la grande livrée du roi, qui était capitaine titulaire des 2 compagnies.
Les banderoles des hautbois ressemblaient aux banderoles des trompettes en usage dans la maison du roi.
La caisse des tambours était peinte en bleu et portait les armes de France.
Ces deux compagnies furent supprimées en 1775.
COMPAGNIE DES GRENADIERS A CHEVAL
En 1676 le roi créa, pour sa maison, une compagnie qui devait lui servir d’avant-garde, d’éclaireurs, en un mot, faire absolument le service exigé alors des dragons, faire les abatis, préparer les chemins, etc. Pour cela et depuis lors, on la recruta exclusivement parmi les grenadiers des régiments d’infanterie, grands, forts, et braves. Louis XIV, qui estimait les intrépides, veillait attentivement à son recrutement.
Dans cette compagnie, les grades étaient tous conférés par le roi, et n’étaient pas vendus.
Cet escadron n’avait qu’un étendard qui lui avait été accordé, en 1692, après le combat de Leuze où cette poignée de braves en avait enlevé cinq à l’ennemi.
Les officiers avaient rang de mestre de camp. Les sergents avaient rang de capitaine, les brigadiers et sous-brigadiers rang de lieutenant, retraite de capitaine.
Les simples grenadiers avaient rang de sergent et retraite de lieutenant aux Invalides.
La solde, convenable pour des soldats, était tarifée ainsi :
Les soldats touchaient les mêmes rations que la gendarmerie de France.
Leur équipement, leur armement étaient ceux des dragons, et ils portaient comme eux les outils tels que haches, serpes, pelles, etc., etc.
Leur uniforme était l’habit bleu à la Française, doublure, veste et parements rouges, bordés, brandebourgs, boutonnières et boutons d’argent. Manches en bottes, poches en travers, bandoulière en buffle galonnée en argent comme le ceinturon. Bonnet de drap rouge à galon d’argent, bordé de peau d’ourson noir. Culotte et bas rouges, guêtres de toile noircies, équipage bleu bordé argent.
Maintenue en 1762, cette troupe fut réformée en 1776, et on répartit entre les régiments de dragons comme maréchaux des logis les braves soldats qui la composaient.
INFANTERIE DE LA MAISON DU ROI
RÉGIMENT DES GARDES FRANÇAISES
En 1563, les troubles qui agitèrent la France pendant la minorité du jeune roi Charles IX, décidèrent Catherine de Médicis à attacher à sa personne dix compagnies d’infanterie, qui prirent le nom d’enseignes de la garde du roi.
Ces gardes furent appelées Françaises cinquante ans plus tard, lorsque Marie de Médicis eut appelé au même service un régiment de soldats suisses.
Louis XIV conserva ce régiment avec son organisation séculaire, mais se garda bien de composer les autres sur ce type.
Le colonel des gardes françaises, en qualité de chef du plus ancien corps de l’infanterie, avait autorité sur tous les autres colonels. Au reste, le roi n’accordait le régiment qu’à un lieutenant général ou à un maréchal de France précédemment colonel du régiment du roi (12e d’infanterie).
Le major des gardes était aussi, par son titre, major général de toute l’infanterie.
Tous les capitaines avaient rang de colonel ; les lieutenants, rang de lieutenant-colonel ; les enseignes et autres, rang de capitaine.
Le recrutement se faisait à prix d’argent, cinquante livres au lieu de trente qu’on payait ailleurs ; l’habillement, l’équipement étaient plus luxueux que dans les régiments ordinaires ; pour cette raison, comme aussi pour payer l’honneur d’approcher le roi, une compagnie aux gardes valait 80,000 livres, deux fois plus qu’un régiment ! Les compagnies étaient logées à Paris, longtemps chez l’habitant, et, depuis 1730, dans des maisons vides louées à cet effet. Les soldats avaient la liberté de travailler pour le compte des particuliers, les jours qu’ils n’étaient point de service. Ils pouvaient même ne coucher à la caserne que la veille et le lendemain de la garde à Versailles. Il fallait que l’absence durât un mois pour être déclaré déserteur.
Le service consistait à veiller dans les cours et jardins du château qu’habitait le roi.
A cet effet, tous les 5 jours, de tous les points de la ville, quatre compagnies se réunissaient à 5 heures du matin à la Croix de Vaugirard. Elles partaient pour Versailles sous le commandement d’un capitaine. A dix heures, le major les passait en revue sur la place d’armes, et à onze, elles entraient, enseignes déployées, dans la première cour du château où elles prenaient le service conjointement avec les gardes suisses.
En temps de guerre, 22 compagnies sur 33 allaient rejoindre l’armée, laissant 11 compagnies à Paris.
La solde était payée par avance tous les dix jours, selon le tarif mensuel suivant :
Le roi accordait 12 paies de gratification lorsque la compagnie était complète à 110 hommes en diminuant d’une paie pour tout homme en moins du complet.
Le régiment formait 6 bataillons. Chaque bataillon comptait 5 compagnies de fusiliers à 110 hommes et une demi-compagnie de grenadiers à 55 hommes.
L’état-major se composait du colonel, de 1 lieutenant-colonel, 1 major, 6 aides-majors, 6 sous-aides-majors, 1 maréchal des logis, 1 sergent-major, 1 tambour-major, 1 aide-tambour-major, 1 médecin, 1 chirurgien, 1 apothicaire.
La prévôté se composait de 1 auditeur général des bandes françaises et du régiment des gardes, 1 prévôt général des bandes, 1 lieutenant de la prévôté générale, 1 greffier, 12 archers et 1 exécuteur de justice.
La prévôté était payée par le colonel.
L’effectif des compagnies était augmenté pendant la guerre ; en 1744, il fut porté à 126 hommes ; en 1756, à 150 hommes ; mais toujours réduit à 110 hommes en temps de paix.
L’ordonnance du 29 janvier 1764 mit un terme à quelques-uns des nombreux abus qui découlaient d’une organisation surannée. La réforme qui modifiait le recrutement, l’administration de l’armée, fut étendue au régiment des gardes.
Le major seul et les aides-majors eurent qualité pour recevoir les engagements et les capitaines furent délivrés du souci du recrutement. Le matériel fut dès lors propriété du roi. Cependant le prix des compagnies fut maintenu à 40,000 livres, quoique le capitaine fût déchargé de toutes ses obligations pécuniaires. Le sergent d’armes fut chargé de la conservation du magasin et dut ordonner les réparations journalières ; le sergent-fourrier eut à veiller aux subsistances, distributions, campement, propreté, discipline.
L’engagement fut fixé à 8 ans moyennant 120 livres. Pour être admis, il fallut avoir plus de 18 ans, moins de 25, et 4 pieds 4 pouces. Il fut défendu aux soldats de travailler dans Paris sans permission spéciale. Des casernes furent construites par les soins du ministre.
La composition du corps resta pourtant la même que précédemment : 30 compagnies de fusiliers de 110 hommes, divisées en 8 escouades, comprenant :
4 sergents, 1 sergent d’armes, 1 sergent-fourrier, 8 caporaux, 1 caporal porte-drapeau, 1 caporal magasinier, 1 caporal-fourrier, 1 caporal canonnier; 8 appointés fusiliers, 1 appointé magasinier, 1 appointé chirurgien, 2 appointés canonniers, 76 fusiliers et 4 tambours ;
Enfin, 6 officiers : 1 capitaine, 1 lieutenant, 2 sous-lieutenants, 1 enseigne à pique, 1 enseigne à drapeau.
Les 3 compagnies de grenadiers avaient la même composition, sauf qu’elles ne comptaient pas de canonniers, mais 4 grenadiers charpentiers.
Un corps de musique de 16 musiciens : 4 hautbois, 4 clarinettes, 4 bassons, 4 cors, fut établi vers la même époque 1765. Le collet bordé d’argent était la marque distinctive des musiciens.
C’est sur ce pied que fut conservé le régiment jusqu’à la mort de Louis XV.
L’armement était celui de l’infanterie. Les officiers portaient toujours l’esponton comme, sous Louis XIV, les sergents la hallebarde. Pendant la guerre de Sept ans, sergents et officiers prirent le fusil, qu’ils déposèrent à la paix pour reprendre l’esponton. Chaque compagnie avait un drapeau bleu semé de fleurs de lis d’or et croix blanche ornée de couronnes au haut des branches. Le drapeau colonel était semblable, mais tout blanc.
Uniforme en 1740.
Justaucorps bleu ; doublure, parements, veste, rouges, agréments de trois en trois sur l’habit ; boutonnières blanches et bordé blanc sur la veste.
Ceinturons et fourniments de peau de chamois piqués de blanc. Cartouche ou demi-giberne de cuir rouge aux armes du roi brodées en aurore.
Culotte et bas rouges, boutons d’étain plats façonnés, gants blancs, guêtres blanches à boutons, chapeau bordé d’argent, cravate et cocarde de soie noire.
L’uniforme des sergents était semblable, mais les agréments étaient d’argent ainsi que le bordé du parement.
L’habit des officiers était de différente forme suivant les circonstances.
En grande cérémonie : justaucorps bleu, galonné d’argent sur toutes les coutures, bordé sur le devant d’un double galon d’argent dit à la Bourgogne, ainsi que sur les poches et les parements ; la veste rouge galonnée de même. Culotte de velours noir, bas rouges, jarretières d’argent, souliers à boucle.
Chapeau galonné d’argent, orné d’un plumetis blanc tout autour.
Jabot et manchettes de dentelles ; hausse-col en argent doré.
Pour la tenue habituelle : justaucorps en drap bleu ; boutonnières brodées en fil d’argent ; simple bordé d’argent sur la manche, et une légère broderie d’argent sur le bordé de l’habit et sur les poches. Veste rouge à 2 rangs de boutons d’argent ; boutonnières idem. Culotte rouge et guêtres blanches ; chapeau sans plumet.
En campagne, un surtout sans broderie ; boutons et boutonnières d’argent ; galon simple au parement.
En 1765, un uniforme nouveau fut adopté :
Habit bleu, doublure bleue, culotte bleue, parements, collet et veste, rouges ;
12 agréments blancs en brandebourgs de chaque côté sur l’habit ;
3 agréments sur le parement ainsi que sur la poche ; autant derrière ; habit bordé de galon blanc ;
Veste rouge, bordée avec 16 boutonnières de fil blanc ;
Chapeau bordé de laine blanche ; cocarde blanche ; guêtres de toile.
Les grenadiers prirent le bonnet de peau d’ours à plaque de métal blanc timbrée aux armes de France ; cordons et tresses blanches, plumet blanc.
Armement et équipement de l’infanterie :
Officiers : habit de grand uniforme bleu de roi ; parements, collet, veste, doublure et culotte en drap écarlate, brodés en argent à paillettes ; boutonnières en brandebourg jusqu’à la poche ; basque d’habit brodée en dessous.
Pour le petit uniforme : doublure et culotte bleues ; broderies d’argent sans paillettes.
Les sergents portaient l’habit bleu bordé d’un galon formant boutonnières d’argent et les basques et le retroussis de l’habit galonné.
Les tambours portaient la livrée du roi ; les charpentiers, le bonnet de peau d’ours mais plus bas que celui des grenadiers et le tablier de cuir noir, selon l’ordonnance de 1758.
Le régiment des gardes françaises conservait, même en temps de paix, les 6 pièces de canon qu’on lui avait données en 1758.
Ce régiment, longtemps dans la famille de Grammont, fut commandé, après Fontenoy et jusqu’en 1788, par le duc de Biron, pour lequel les soldats professaient une affection singulière, au point que, lors de leur révolte en 1789, qui amena la prise de la Bastille, beaucoup alléguèrent que, si le duc de Lauzun, son fils, lui eût succédé, on n’aurait pas eu à déplorer leur conduite. Plusieurs sergents de ce régiment étaient chevaliers de Saint-Louis.
RÉGIMENT DES GARDES SUISSES
Ce corps, levé depuis longtemps déjà, fut en 1616, spécialement affecté à la garde du jeune roi Louis XIII et prit alors le nom de gardes suisses.
Son recrutement était semblable à celui des autres régiments suisses au service du roi, c’est-à-dire qu’il se composait de compagnies héréditaires ou avouées par les 13 cantons, complètes à 200 hommes en temps de paix, 235 en temps de guerre.
La 1re compagnie appartenait en propriété au colonel général des Suisses. Elle avait une administration distincte, sa justice particulière, composée de 1 grand juge, 1 maréchal des logis, 1 truchement, 1 aumônier, 1 grand fourrier, 1 chirurgien-major, et 12 hallebardiers qui servaient toujours auprès du colonel général. Seul le colonel général disposait des grades dans cette compagnie. La solde y était plus forte qu’aux autres, cependant le service était le même.
Le régiment proprement dit comptait 11 autres compagnies commandées par des capitaines qui, souvent, étaient brigadiers ou maréchaux de camp, propriétaires de régiments suisses. La 1re était la compagnie colonelle, appartenant en propre au colonel du régiment ; la 2e, celle du lieutenant-colonel. Pour entretenir sa compagnie complète à 200 hommes, suivant les ordonnances, le capitaine recevait 230 places à 20 livres 6 sols. Avec cette somme, il devait appointer les officiers qu’il choisissait et présentait à l’agrément du colonel général. Le roi donnait en outre 142 livres par mois pour appointer les meilleurs soldats et les porte-outils. Cette solde devait être répartie entre les 200 hommes de la compagnie savoir : 1 lieutenant appointé à 130 livres par mois, 1 autre à 120, 1 sous-lieutenant à 90, 1 enseigne à 75, 2 sergents à 35 livres, 2 autres à 30, 3 autres à 25, 1 chirurgien à 30.
4 trabans, 6 caporaux, 6 appointés, 5 tambours, 1 fifre et 162 fusiliers.
Lorsque le capitaine était retenu loin de sa compagnie par les devoirs d’une charge ou d’un commandement supérieur, il devait donner 200 livres à son lieutenant et entretenir un 2e enseigne à 75 livres. Le régiment avait onze drapeaux d’ordonnance. Seule, la compagnie générale avait le drapeau de taffetas blanc à croix blanche.
Le grand état-major du régiment se composait du colonel et du lieutenant-colonel, de 1 major, 3 aides-majors, 1 commissaire général qui avait le contrôle et la police des officiers, 1 maréchal des logis, 1 sergent-major, 1 tambour-major, 1 médecin, 1 chirurgien, 2 aumôniers.
Il n’y avait point de compagnies de grenadiers, car les cent suisses en tenaient lieu.
En temps de paix, les 12 compagnies formaient 4 bataillons de 3 compagnies ; en temps de guerre, 3 bataillons de 4 compagnies ; un seul restait pour le service au château. L’effectif de chaque compagnie fut maintenu à 235 hommes, de 1744 à 1748, mais fut abaissé après la guerre à 175 hommes jusqu’en 1763.
Le régiment était cantonné dans les villages des environs de Paris, dans des maisons louées à cet effet. Les 3 premières compagnies occupaient les portes Montmartre, Saint-Antoine et Saint-Roch, à Paris ; les autres demeuraient à Nanterre, Rueil, Puteaux, Suresnes, Courbevoie, Colombe, Argenteuil, Sartrouville, Saint-Denis, Vanves, Montrouge et Vaugirard. La discipline, l’armement, l’habillement, l’administration, étaient les mêmes que pour les régiments suisses ; la seule différence était dans le costume en drap plus beau, et la solde plus élevée : 20 livres au lieu de 16.
Cette organisation séculaire fut bouleversée par le duc de Choiseul qui, profitant de sa position de colonel général des Suisses et de ministre de la guerre, appliqua aux gardes les réformes qui transformaient toute l’armée.
Les compagnies ne furent plus affectées à tel canton et les hommes furent versés indistinctement dans toutes les compagnies. Les capitaines durent opter entre le commandement de leur compagnie ou leurs autres fonctions. Le ministre seul fut le maître de l’avancement autrefois réservé au capitaine. Celui-ci ne garda de ses antiques privilèges que le droit de présentation pour le grade de sous-lieutenant. La compagnie fut réduite à 110 hommes répartis en 8 escouades, et les sergents furent appelés à élire leurs collègues parmi les fourriers et caporaux.
On créa des compagnies de grenadiers de 56 hommes en 4 escouades accordant 150 livres d’indemnité au capitaine qui fournissait ce précieux soldat.
L’engagement contracté depuis 1740, pour 6 ans, moyennant 120 livres, fut fait pour 4 ans moyennant 200 livres, par tête de soldat né en Suisse, haut de 5 pieds 5 pouces, engagé en Suisse et dirigé sur le dépôt central de Belfort. Lorsque le soldat était engagé en France, Suisse ou fils de Suisse, le prix n’était que de 60 livres. Les soldats alsaciens étaient admis aux gardes.
La solde mensuelle fut tarifée ainsi :
Sur son traitement, le colonel payait les appointements des musiciens, le tambour-major, la prévôté.
L’état-major de la compagnie générale fut supprimé. Des canonniers, des grenadiers charpentiers, furent établis comme aux gardes françaises.
Après cette réforme, le régiment coûtait plus cher au roi, il était moins fort, et le soldat recevait moins que par le passé.
Chaque compagnie recevait 9,600 livres par an pour subvenir aux frais du recrutement qui pourtant était plus pénible qu’au temps passé.
L’armement était celui de toute l’infanterie suisse : le fusil à baïonnette modèle 1754, l’épée et 4 canons de campagne système Rostaing. Ces armes appartenaient à la nation suisse.
De 1722 à 1763 l’uniforme resta sensiblement le même, sauf quelques légères modifications dans la coupe de l’habit. Habit rouge, doublure et parements bleus ; agréments blancs de trois en trois. Veste bleue bordée de blanc, 12 boutonnières blanches, boutons d’étain plat. Culottes et bas bleus. Guêtres de toile blanche ou noire suivant la saison. Ceinturons et fourniments de buffle piqués de blanc. Cartouche de cuir rouge, estampage aux armes du roi en cuivre jaune, gants blancs, cravate de crépon noir. Cocarde noire, chapeau bordé d’argent.
Les officiers, pour le grand uniforme, portaient l’habit rouge galonné à la Bourgogne en argent, la veste et la culotte de velours noir, les bas blancs et souliers à boucle. En service ordinaire, l’habit rouge doublure et parements de drap bleu à brandebourgs d’argent, culotte bleue, veste bleue brodée d’argent, les guêtres de toile ou de laine blanche.
Les sergents portaient tous l’habit bleu à galons d’argent. Les tambours, l’habit à la livrée du roi.
En 1763, ce grand et bel uniforme fut remplacé par l’habit à la Prussienne adopté par toute l’armée.
Habit rouge écarlate, parements revers et collet bleu de roi. Doublure, veste et culotte, blanche. Guêtres de toile blanche et boutons de fil blanc. Col rouge. Poches en travers, 7 petits brandebourgs en losange posés à égale distance sur le revers de l’habit en galon de fil blanc. 3 grands brandebourgs semblables en dessous, 2 sur chaque parement, 2 sur le pli de l’habit, 2 sur chaque poche, petits boutons d’étain sur le revers, 3 gros au-dessous. Chapeau bordé de fil blanc avec houppes de couleurs distinctives des compagnies. Les grenadiers portaient le bonnet à plaque de cuivre jaune, orné de tresses et plumet blanc.
Les grenadiers charpentiers portaient un bonnet d’ourson plus petit avec plaque de cuivre semblable. Un tablier de cuir blanchi et une grosse hache. Les manches couvertes de 8 chevrons posés, à distance égale, sur les deux bras.
Les sergents prirent aussi l’habit rouge, les insignes du grade semblables à ceux établis pour le reste de l’armée. Les officiers, même uniforme avec galons d’argent fin. Insignes du grade comme aux autres troupes.
Ce vieux corps, qui avait partagé toutes les gloires du nom français, fut maintenu 30 ans encore. Dernier et suprême défenseur de la monarchie, il fut abandonné par son maîitre aux fureurs d’un peuple délirant et les derniers survivants du massacre furent licenciés le 12 août 1792.